Ousmane Sow est un nom qui n’est plus tout à fait inconnu des Parisiens. En 1999, ils ont vécu avec ses statues pendant deux mois, sans se lasser de les voir et les revoir sur les affiches ou sur le pont des Arts où elles étaient exposées. Des centaines de milliers de curieux ont défilé devant les Noubas, les Peuls et les Indiens, intrigués, fascinés, enthousiasmés ou dégoûtés. L’artiste n’est plus là depuis longtemps, comme si ce formidable succès n’avait jamais existé, ou si peu. Parti rejoindre son "Sphinx", sa maison de Dakar où il vit, pense et crée.
D’atelier, il n’a pas. Juste un bout de jardin poussiéreux, un morceau de cour vite envahi par les carcasses métalliques qui ossifient ses personnages, par les bidons où stagne la matière étrange et unique dont il façonne les muscles des statues, dont il a entièrement recouvert la maison. Y flotte une odeur permanente de colle et d’essence de térébenthine.
Géant débonnaire aux yeux fixés sur un ailleurs qui s’échappe, Sow aime aller d’une pièce à une autre, d’une passerelle à un couloir, foulant le carrelage multicolore qui, à lui seul, meuble le vide. Il aime le silence et la solitude de la salle de méditation et la promiscuité des corps en création. Avare de mots, économe de gestes, il ne s’émeut qu’auprès de ses créatures. Là, son coeur bat plus fort. Démiurge en miniature, il modèle en vase clos des êtres figés plus grands que nature, règnant en maître absolu sur ces contradictions dont, de temps à autre, il partage la genèse avec un interlocuteur. Alors la porte s’ouvre, celle de l’atelier livre passage à l’oeuvre d’art, celle de l’esprit, à son interprétation.
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